Liberté Chérie !
Bonjour à toutes et tous Si toute la planète était au moins vraiment dans le rouge, Juju ? Elle est plutôt dans la mouise ! ! ! Et encore nous faudrait-il préciser de quel rouge parle-t-on : rouge cœur, rouge sang, rouge souffrance ? C’est Jacques Prévert qui écrivait : " Quand la vérité n'est pas libre, la liberté n'est pas vraie. " Alors, la liberté et la démocratie, à quoi cela tient ? Ceci pour répéter, désolé, que les mots se chargent de sens différents en fonction de leur usage social, idéologique et historique, j’en parlais pour démocratie ou communisme. Mais au-delà des mots il y a les valeurs. Et c’est bien parce que certaines valeurs n’ont pas de prix aux yeux des peuples du monde et qu'elles peuvent transcender les frontières même linguistiques que beaucoup essaient de les récupérer par le biais du langage et de les usurper. Si la France a pu gagner quelque crédit aux yeux des peuples de ce monde c’est quand la Révolution a su incarner à ce moment historique donné, prolongé ensuite par la Commune, une formidable aspiration au respect et à la dignité de tous ces peuples matérialisée par trois mots fondateurs : Liberté, Egalité, Fraternité. Et ce qu’il reste de ce crédit aujourd’hui passe encore par ses valeurs et certainement pas par les lamentables ersatz de ce que le capitalisme peut produire de pire et qui constituent le visage officiel de la France aujourd’hui. Mais le langage est une des batailles idéologiques les plus essentielles et le capital l’a très tôt et très bien compris : dès lors que certains mots acquièrent une connotation négative, on essaie de désamorcer leur charge négative par divers moyens, entre autres celui d’en récupérer d’autres quitte à dévoyer leur sens. Si les Patrons et le Patronat pouvaient au départ avoir une connotation positive de par les traditions religieuses et sociales ( voir les saint-patrons des corporations et des métiers ainsi que les innombrables fêtes patronales dans les villages et dans les entreprises ), c’est par la lutte des peuples et des exploités qu’ils ont acquis une charge négative. D’où le recours croissant à tout d’abord " l’entreprise ", concept globalisant censé inclure l’ensemble de ceux qui la composent, pour progressivement ne désigner que celui qui la dirige, voir aujourd’hui le MEDEF affirmer " les entreprises " quand il parle du patronat seulement, en ayant au passage totalement évacué la question des antagonismes de classe ! Et puis l’entreprise au départ associe tout le monde alors pourquoi s’en méfier, elle fait référence à l’action d’entreprendre, donc à l’initiative, la créativité et " in fine " à la liberté, celle d’entreprendre bien sûr, dont les patrons sont la " brillante " illustration, CQFD ! On en conclut ainsi en boucle sur le thème de la " libre entreprise " ! Et je ne parle pas de tout le travail d’aliénation idéologique réalisé dans ces mêmes entreprises sous couvert de " culture d’entreprise ". Avec aussi des lieux de travail que l’on débaptise dès lors qu’ils ont constitué un référent social de lutte et de résistance, on ne parle plus dans l’espace public d’ateliers, d’usines, de la mine, on dématérialise avec " les entreprises " et si l’on concède encore avec la bouche pincée le terme " ouvrier ", la classe ouvrière est rangée dans le lot des archaïsmes ringards pour ne pas dire obscènes. Il en est de même pour le capitalisme qui a connu, peu ou prou le même processus d’évolution historique, peut-être plus précoce, car plus transnational. Et d’ailleurs plus il devient violent et destructeur pour les peuples et la planète, plus il convient de lui trouver une image plus amène que celui que les luttes du mouvement ouvrier ont fini par lui donner : D’abord, il y a un long travail de matraquage médiatique destiné à installer la nouvelle appellation comme la plus idoine pour dépeindre sa réalité, avec simultanément tout le travail de " ringardisation " de certains mots stigmatisés comme dépassés et anachroniques ( donc " indignes " de l’espace public ), l’idée étant si possible de les faire disparaître du langage courant : voir l’évolution du capitalisme vers le libéralisme, donc là-aussi liberté d’entreprendre, liberté d’initiative dans la même gamme que précédemment et tout cela est très construit. Ce travail sur les mots est aussi fonction des cultures historiques propres qui peuvent donner au même mot des connotations très différentes d’une culture à l’autre. Entre la culture et l’histoire française, et la question de l’intervention de la puissance publique dans l’économie plus la culture des Lumières et une culture anglo-saxonne beaucoup plus portée sur la séparation de ces deux domaines, alliée au puritanisme intrinsèque de la société états-unienne, on en arrive par exemple à des sens très divers pour le mot " libéral " : en France, malgré tout le matraquage médiatique, il reste très marqué à droite, et très associé à une culture politique et économique anglo-saxonne alors qu’aux U.S.A., il plutôt marqué à gauche même en terme sociétal, pour ne pas dire très à gauche, le Maccarthysme étant passé par là en criminalisant le mot, il est pour beaucoup de médias états-unien presque un synonyme de communiste ! Nous pouvons aussi nous attarder sur l’utilisation du mot " réforme " par exemple, ou sur les batailles sémantiques actuelles autour de la rigueur ! Mais le plus dommageable est assurément quand ce sont les propres adversaires du capitalisme qui finissent par adopter ses codes de langage en renonçant aux leurs, car les conséquences de ce que je considère comme un recul idéologique sont loin d’être négligeables. Et je pourrais tout autant évoquer la question des symboles et de l’image. C’est donc bien en mettant l’accent sur les valeurs, leur contenu et la nécessité de mettre nos pratiques autant que faire se peut en accord avec ces valeurs que nous pouvons dépasser ces contingences nationales et donner corps à l’internationalisme ! Cela suppose de les porter avec fierté, dans la clarté de la démarche et de ses finalités, avec humilité face à l’histoire et au monde, donc tout en étant capable d’accepter la diversité des " points de vue " tant au sens propre que figuré, et d’intégrer toute contribution ou vision comme aussi " qualifiée " que la nôtre à priori ! Mais avec la conviction que c’est dans ce processus d’échanges que nous pouvons tous grandir et nous enrichir, individuellement et collectivement Le problème de la corrélation entre modes de production et satisfaction des besoins sociaux est un problème mondial qui prend de graves proportions aujourd'hui, même s’il se pose de diverses façons en fonction des pays, mais c’est bien le capitalisme qui est à l’origine de ce hiatus. Comme si les questions de souveraineté alimentaire et "d'arme alimentaire" constituaient de soudaines révélations ! Alors, comment mener bataille pour concilier l’urgence et la perspective politique ? A mon humble avis, certainement pas en adoptant un profil bas et en nous diluant idéologiquement en entretenant l’illusion que cela nous rendra " présentables " pour la pensée dominante ! Pedro DA NOBREGA