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LE PIGEON BLEU
31 juillet 2008

L’Equateur face à la dictature médiatique

Rafael_Correa

À l’approche du référendum sur la nouvelle Constitution prévu en septembre, le climat de la lutte des classes se réchauffe à nouveau dans ce pays voisin, et encore une fois, la dictature médiatique se retrouve au centre du conflit. Le Président Rafael Correa a pris, la semaine dernière, des mesures contre trois chaînes de télévision appartenant à des banquiers responsables de détournements de fonds publics s’élevant à 661 millions de US$. De plus, dans une procédure commune à n’importe quel pays capitaliste " civilisé ", le gouvernement a procédé à l’examen du renouvellement de la concession publique pour environ 300 chaînes de radio et de télévision du pays ( 25 % du total).

Ces mesures ont aussitôt provoqué une levée de boucliers chez les magnats des média et leurs relais internationaux, qui ont cyniquement crié à " l’attentat contre la liberté d’expression ". La funeste Société Interaméricaine de Presse (SIP), qui avait prêté tout son concours au putsch médiatique d’avril 2002 au Venezuela et qui n’a jamais condamné la censure induite par le "Patriot Act" aux U.S.A., a durement fustigé ces mesures. "Elles constituent le paravent légal d’une politique de censure. Nous craignons que se mette en œuvre une politique semblable à celle du gouvernement de Hugo Chávez au Venezuela, où toutes les excuses possibles ont été utilisées pour fermer des organes de communication", a déclaré le mercenaire Gonzalo Marroquín, Président de cette organisation.

La cohérence de la fédération des journalistes

Malgré tout ce matraquage, Correa ne s’est pas laissé intimider et a tourné en dérision les arguments de ses détracteurs. "Alors maintenant, saisir les biens de Banquiers qui ont ruiné le pays, tout en continuant à prospérer, serait menacer la liberté d’expression ? Qui peut croire une telle fadaise ? ", a-t-il affirmé. La saisie de 198 entreprises et propriétés des ex-banquiers Roberto e William Isaías, parmi lesquelles se trouvent les chaînes de télévision TV Gamavisión, Televisión e Cablevisión, a d’ailleurs reçu le soutien de la Fédération des Journalistes de l’Equateur, attitude assurément plus cohérente que celles de bien des organisations de ce type en Amérique Latine.

Dans une louable expression d’indépendance, elle a d’abord demandé le respect de la liberté d’expression et des droits sociaux des salariés des chaînes, mais a cependant estimé justes et légales les mesures gouvernementales. Elle a également critiqué les manipulations de l’oligarchie médiatique, en dénonçant le "traitement qui est fait de cette information, en dehors de son contexte et sans la rigueur professionnelle qu’elle demande, surtout lorsque l’on évoque la liberté de la presse". Les frères Isaías, propriétaires de la Filanbanco et de chaînes de télévision, ont provoqué la faillite de 21 banques à la fin des années 90. Ils se sont enfuis aux U.S.A. et une demande d’extradition de la part de l’Equateur est en cours. Le gouvernement Correa a donc décidé de saisir leurs biens et de les mettre en vente afin que le produit de ces cessions atténue les préjudices causés par les criminels financiers.

"Les Chiens de garde du capitalisme"

Les relations du nouveau gouvernement avec l’oligarchie médiatique ont rapidement viré à l’aigre. Lors du scrutin présidentiel de 2006, les grands organes privés de communication ont ouvertement fait campagne contre Correa. Le reporter Luiz Carlos Azenha, de la TV Globo ( principale chaîne TV brésilienne – privée, ndt ) écrit dans son blog : "L’oligarchie médiatique putschiste, qui représente l’élite blanche, raciste et réactionnaire n’est pas qu’un phénomène brésilien. Elle se fait le héraut de cette minorité quel que soit l’endroit où le pouvoir de l’élite est contesté et remis en question. En Equateur, où le parti de Rafael Correa a pourtant obtenu plus de 60% des suffrages lors des élections pour l’Assemblée Constituante[...], les média ont eu recours au même type de campagne terroriste que Hugo Chávez a du affronter au Venezuela et à laquelle Lula doit faire face au Brésil. C’était la fin du monde annoncée avec l’arrivée de Correa, qui s’étalait dans tous les éditoriaux".

Dans le courant de l’année dernière, les tensions se sont accrues. Dans un acte de courage, le Président a intenté un procès pour diffamation et calomnie envers un des plus virulents éditorialistes de l’oligarchie médiatique équatorienne, le directeur du journal " La Hora ", Francisco Vivanco. Le tristement célèbre Comité Mondial de la Presse, basé à Washington, a promptement accusé Correa de "vouloir réduire les journalistes au silence" et la SIP a fustigé "une mesure indigne de la part du Président". Même le journal " O Globo " - organe de presse du groupe Globo, premier groupe privé dans les médias au Brésil, ndt – relayant les douleurs des dictateurs médiatiques, a osé un titre racoleur : "Correa poursuit la bataille contre la presse en Equateur".

Dernièrement, lors du débat sur la nouvelle constitution à l’Assemblée, Correa a choisi d’aller à l’affrontement avec l’oligarchie médiatique hégémonique. Lors d’une interview accordée au journal " Página/12 ", il a déclaré que "la Constitution allait interdire que des groupes financiers contrôlent d’autres entreprises en dehors du secteur financier. A l’heure actuelle, sur sept chaînes nationales de télévision, cinq appartiennent à des groupes bancaires. Si nous souhaitons soulever la question d’une régulation des taux d’intérêts ou d’une diminution des tarifs concernant les services bancaires, vous pouvez aisément imaginer la campagne qu’ils vont mettre en place ... Comme a pu l’écrire Ignácio Ramonet [directeur du journal français " Le Monde Diplomatique "], ils sont les chiens de garde du système économique en place. Ils représentent en Amérique Latine les plus fervents partisans du status quo. Voilà des entreprises qui, sous couvert de liberté d’expression, défendent leurs intérêts particuliers".

Altamiro BORGES – 16 juillet 2008

journaliste, membre du Comitê Central du PcdoB

http://altamiroborges.blogspot.com/

traduction Pedro DA NOBREGA

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Commentaires
P
pour la trad. Un éclaicissement de plus![Héééhooo]
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