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LE PIGEON BLEU
24 octobre 2008

décodage sur l'Ukraine

Ukraine : le bras de fer s’intensifie autour d’élections législatives anticipées

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Selon les médias occidentaux, le Président ukrainien Iouchtchenko a entamé un nouveau round dans sa lutte de pouvoir avec son ex-alliée Ioulia Timochenko. Il est intéressant de noter que Iouchtchenko a annoncé sa décision de dissoudre le Parlement le 8 octobre 2008 ; il effectuait alors une visite officielle en Italie, or son allocution télévisée avait été enregistrée à l’avance pour être diffusée en Ukraine, tard le même jour. Craignait-il une levée de boucliers, vu la faiblesse de ses soutiens à l’Assemblée, voire une procédure d’impeachment, à laquelle il se serait soustrait par son voyage à l’étranger ? Après l’échec d’une réunion avec Iatseniouk, le Président de l’Assemblée, et des représentants des différentes fractions parlementaires, il a réitéré lors de son séjour en Italie son appel à la tenue de nouvelles élections, qu’il a fixées unilatéralement au 7 décembre. Le porte-parole du BIouT (le bloc Timochenko) s’est plaint qu’il n’y ait eu pratiquement aucune discussion à ce sujet, ni au Parlement ni au cours de la réunion (cf. notamment la Rossiskaïa Gazieta (Moscou) du 10 octobre). Si l’on procède vraiment à de nouvelles élections, ce seront les troisièmes en moins de 3 ans !

Le coût de ces élections, que le gouvernement et le Parlement doivent approuver immédiatement a été évalué à 417 millions de hrwyna,(= 60 millions €) ; le Président, en a décidé ainsi le 10 octobre.

C’est une contradiction en soi : le Parlement et le gouvernement devraient approuver le coût de nouvelles élections, et s’auto-dissoudre ensuite !! Ce n’est pas seulement le gouvernement de Madame Timochenko qui est opposé à la dissolution du Parlement. Même dans le camp présidentiel, " Notre Ukraine- Autodéfense populaire " on assiste à une rébellion. Dès le 7 octobre le Président de la fraction " Autodéfense populaire " et alors Ministre de l’Intérieur, Iouri Loutsenko, avait annoncé que la majorité des députés de son bloc souhaitaient le maintien de la coalition au pouvoir. La fraction Litvine était, paraît-il, du même avis. Seuls le Président et son secrétariat s’opposeraient à une reconstitution de la coalition. Selon Loutsenko, les nouvelles élections ne viseraient qu’à faire disparaître Madame Timochenko du paysage politique. La fraction " Autodéfense populaire ", qui rejette elle aussi la dissolution du Parlement, a quitté le bloc Iouchtchenko, S’y ajoutent les critiques formulées par 7 des 9 partis qui constituent la fraction " Notre Ukraine " au sujet de la décision précipitée de Iouchtchenko, qu’ils lui demandent de retirer. En cas contraire, ils abandonneraient le " navire qui coule ". Car pour le bloc " Notre Ukraine- Autodéfense populaire ", de nouvelles élections seraient à coup sûr un désastre. Quant aux communistes, ils font remarquer que Iouchtchenko est irresponsable, car il aurait dit sèchement, lors de la concertation qui a eu lieu la veille de l’annonce de dissolution du Parlement " Votez le déblocage des fonds nécessaires à la tenue des élections et il y aura un décret. " P. Simonenko, le leader du bloc communiste, a plaidé aussitôt en faveur d’une procédure d’impeachment contre Iouchtchenko. Selon lui, cette concertation en a montré clairement la nécessité. Les tendances en faveur de la dissolution qui se font jour à l’intérieur du bloc présidentiel conduiraient maintenant à la formation d’un Parti du Président dont Victor Baloga prendrait la tête, selon notamment la Gazeta Wyborcza du 12 octobre (Pologne). Baloga est le directeur du secrétariat (ou chancellerie) du Président et fonctionne depuis un bon moment comme Premier ministre fantôme. Il ne fait pas mystère de son animosité envers Madame Timochenko.

Lorsque Iatseniouk, le Président du Parlement a communiqué le 9 octobre la décision du Président Iouchtchenko, il a souligné que les nouvelles élections devraient être transparentes, démocratiques et finançables. Mais c’est justement ce point qui, en Ukraine, jette le doute sur les véritables intentions de Iouchtchenko. On le soupçonne en effet de vouloir établir une dictature.

En outre Iatseniouk a réclamé au Parlement le déblocage de 417 millions de hrywna sur le budget 2008 pour les frais liés à l’élection ainsi que l’adoption de deux autres amendements de la loi électorale répondant au désir du Président. Mais les 9 et 10 octobre le Parlement s’est séparé sans avoir pris de décision.

Seul le Parti des Régions de Ianoukovitch semble favorable à de nouvelles élections en décembre. Ce parti, qui représente la principale fraction parlementaire, mais se trouve actuellement dans l’opposition, n’aurait rien contre ces élections, si elles se déroulent de façon transparente et loyale et reflètent vraiment la volonté populaire. Le Parti des régions, tout comme les communistes et le bloc Litvine, est opposé à une dissolution immédiate du Parlement et souhaite en tout cas voir le Parlement actuel qui accomplit la sixième législature, rester en fonction jusqu’à la constitution d’un nouveau Parlement démocratiquement élu pour la septième, ne serait-ce que pour empêcher la déclaration de l’état d’urgence en Ukraine, ce qui de toute évidence contrarie Iouchtchenko - preuve des ses intentions putschistes. Qui expliqueraient aussi qu’il veuille dissoudre le Parlement et faire procéder à de nouvelles élections, et qu’il l’ait annoncé lors d’un déplacement à l’étranger (en Italie). Iouchtchenko justifie sa décision par l’absence, au 8 octobre, de propositions parlementaires en vue de former une nouvelle coalition viable, c’est à dire assurée du soutien de plus de 225 députés (majorité simple au Parlement de Kiev qui en compte 450). C’est ce qui aurait conduit à une impasse. Mais il est indubitable que c’est Iouchtchenko lui-même qui a saboté toute tentative de nouvelle coalition avec le BIouT quelles qu’en soient les autres composantes. Il a également exclu, le 8 octobre, toute possibilité de nouvelle configuration parlementaire inédite permettant la formation d’un nouveau gouvernement.

Quelle est la nouvelle raison avancée par le Président pour justifier la dissolution de la Chambre ? Qu’il lui faudrait dissoudre la coalition formée le 2 septembre, qu’il a nommée " coalition de fait " et qui comprend le BIouT, le Parti des Régions et les communistes, soit une majorité de 378 députés sur 450, parce que la limitation des pleins pouvoirs du Président - autrement dit de sa puissance personnelle- aurait affecté l’équilibre des pouvoirs prévu par la Constitution ukrainienne. En réalité, ce qui fait problème, c’est le transfert de pouvoir en faveur des élus du peuple et du gouvernement que ceux-ci ont majoritairement élu. Puis il a reproché au Parlement d’avoir adjoint à son Président Iatseniouk deux vice-présidents, Tomenko du BIouT et Lavrinovitch du Parti des Régions , non habilités à occuper ces postes.

Au sujet de Madame Timochenko aussi Iouchtchenko a travesti les faits. Elle avait fait une importante concession en acceptant le 2 octobre de reconnaître le veto présidentiel relatif aux lois qui restreignent l’octroi des pleins pouvoirs au Président, votées début septembre au Parlement. La majorité requise pour faire échec au veto présidentiel, soit 301 voix (majorité des deux tiers) aurait été atteinte si le BIouT avait voté contre Iouchtchenko avec le Parti des Régions, le bloc Litvine et les communistes et ainsi invalidé son veto.

Le Président ukrainien a également avancé d’autres raisons : les valeurs de la civilisation ukrainienne ainsi que sa sécurité nationale seraient menacées, toutes les réformes économiques entreprises par Madame Timochenko favoriseraient une inflation galopante etc. Autrement dit : les prestations sociales telles qu’augmentation des retraites et des allocations familiales décidées par le gouvernement Timochenko seraient trop élevées.

Iouchtchenko a en outre accusé Madame Timochenko de vouloir satisfaire un désir égoïste de pouvoir et de pratiquer un populisme absolu. Et il a réitéré son reproche de haute trahison lié à l’amélioration des relations avec la Russie. Iouchtchenko a réclamé un Parlement effectivement à même de travailler, c’est à dire un Parlement qui soit à ses ordres à lui.

Dans une interview à Telekanal-Inter Iouchtchenko a souligné que la tenue d’élections anticipées était indispensable. La décision de dissoudre le Parlement et de procéder à de nouvelles élections est irrévocable. Si par exemple les nouveaux amendements étaient rejetés, cela ne changerait rien à son oukase. Dans ce cas on utiliserait les listes électorales de 2007 au lieu des nouvelles. Et il faudrait financer les élections coûte que coûte. Lui, Iouchtchenko, reste toujours le garant de la souveraineté nationale, de la puissance et de l’intégrité territoriale ukrainiennes. D’autres propos du Président ont confirmé cette façon de voir sans appel; Il n’a cessé de souligner qu’il était un ferme soutien de la Constitution ainsi que des droits du peuple et de ses libertés. Mais sans jamais manquer de faire référence à son intangibilité et à son immunité de chef d’État. Ce qui le classe de facto parmi les dictateurs. Un chef d’État qui n’a derrière lui ni la majorité au Parlement, ni le peuple et continue néanmoins à donner des ordres, n’est un chef d’État que sur le papier et par son propre " bon plaisir " !

Le Premier ministre, Madame Timochenko a déclaré, tard dans l’après-midi de vendredi 10 octobre, qu’elle était décidée à conserver sa charge et ne donnerait pas suite aux appels à démission de Iouchtchenko. Le gouvernement en place y restera, sous sa direction, jusqu’à ce qu’un Parlement légalement élu en confirme un nouveau. Elle n’accepterait d’élections législatives anticipées qu’accompagnées d’élections présidentielles, une exigence que désormais formule également la fraction " Notre Ukraine ", le bloc présidentiel, en réaction à l’arbitraire de Iouchtchenko. Ce n’est donc plus seulement " Autodéfense populaire " la fraction dirigée par Loutsenko, ministre de l’Intérieur, qui s’oppose à Iouchtchenko. Une procédure d’impeachment a également été demandée par Iouri Karmazine, député de la fraction " Notre Ukraine ".

Les membres du Présidium du Parlement, Mykola Tomenko, du bloc Timochenko (BIouT), et Lavrinovitch, du Parti des Régions, déclarent qu’une large majorité des députés ne veulent pas d’une dissolution anticipée du Parlement et souhaitent que ce dernier conserve ses pouvoirs de décision et de contrôle au moins jusqu’à la constitution d’un nouveau Parlement sur la base de nouvelles élections démocratiques et transparentes. Madame Timochenko et son bloc sont actuellement hostiles à des élections anticipées en général. Il est intéressant de noter que le soir du 10 octobre Madame Timochenko a été prise d’une mauvaise grippe avec une fièvre élevée (40°)

En Ukraine, on ne sait pas de quoi demain sera fait.

Ajout du 13 octobreDe retour en Ukraine, le Président a décidé aujourd’hui 13 octobre, en commun avec le Conseil National de Défense et de Sécurité ainsi que son secrétariat personnel, mais sans l’accord du Parlement requis par la Constitution, et donc de façon quasi dictatoriale, de financer les élections anticipées au moyen du Fonds de réserve ukrainien. Sur quoi quelques personnes ont manifesté devant le bâtiment de la Commission électorale ukrainienne.

Sources :

AUTEUR: Hans-Jürgen FALKENHAGEN & Brigitte QUECK

Traduit par Michèle Mialane, révisé par Fausto Giudice

www.rada.kiev.ua du 7 au 10 octobre 2008

http://www.tlaxcala.es/pp.asp?reference=6106&lg=fr
 

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