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LE PIGEON BLEU
5 septembre 2008

Bolivie : la dimension raciste de la violence à Santa Cruz

celindamarchaale

2 SEPTEMBRE 2008

La violence déployée par des groupes paramilitaires le 29 août dernier à l’encontre des populations modestes du département de Santa Cruz en Bolivie, pour l’essentiel originaires des régions occidentales, revêt un triple sens : Tout d’abord que l’extrême-droite utilise le racisme pour essayer de récupérer le terrain perdu, ensuite que les classes les plus pauvres s’affranchissent de leur peur de l’oligarchie et de ses groupes paramilitaires, et enfin, que les batailles décisives qui détermineront l’avenir de la révolution bolivienne se dérouleront dans les départements de la Media-Luna (région orientale où se trouvent les états dirigés par l’opposition, ndt).

Par Hugo Moldiz, de La Época

Il n’est pas exagéré de l’affirmer, car cela ne fait que refléter l’état des forces en présence sur le territoire bolivien : Des régions occidentales où le projet électoral d’Evo Morales trouve un soutien massif avoisinant les 70% et des régions orientales où l’opposition contrôle les principales villes des départements de Santa Cruz, Beni, Pando e Tarija.

Ceci explique pourquoi l’ultra-droite bolivienne – qui a encore récemment reçu le soutien de l’ambassadeur des U.S.A., Philip Goldberg, lors d’une rencontre à huis clos le 25 août à Santa Cruz – est en train de perdre le peu de sérénité qui lui restait depuis qu’un indien, en déjouant tous les pronostics et contre "l’ordre naturel" depuis des décennies de la démocratie bolivienne, l’a emporté lors des élections de décembre 2005 avec 54% dos votants et, deux ans et demi plus tard, a obtenu de nouveau une victoire historique en atteignant 67,41% de votes favorables lors du référendum révocatoire du 10 août.

La potion est sévère pour un laps de temps si court. L’impact de ce changement radical en Bolivie a dépassé toutes les prévisions et a fait perdre la tête aux secteurs les plus conservateurs des classes dominantes (dont la plus grande parte est d’origine étrangère), qui, pour masquer leurs intérêts de classe, ont eu recours à un discours régionaliste et raciste, accompagné d’une violence croissante pour faire barrage à la révolte indigène et populaire qui trace sa voie quelles que puissent être ses contradictions et ses limites.

"Qu’avons-nous à attendre de ce maudit indien et je l’affirme à cœur ouvert car il ne me fait pas peur, d’un " cocalero " (paysan qui cultive la coca, ndt), d’un syndicaliste... que pouvons-nous attendre d’un type qui ne sait rien ?", éructait euphorique Ruth Lozada, dirigeante du comité civique féminin sur la Place du 24 Septembre, dans la soirée du 28 août, quelques instants après l’annonce de la convocation par le gouvernement du référendum constitutionnel pour le 7 décembre.

Ces paroles insultantes de la "docte aristocratie de Santa Cruz" ne font que s’ajouter au chapelet d’injures les plus grossières que déversent en permanence les autorités locales sur Morales et les "kollas" – terme péjoratif pour désigner les Indiens aymaras et quechuas, ndt -, rebelles en ces temps de post-modernisme.

Cependant, le racisme comme mécanisme de discipline sociale infligé aux classes subalternes et comme instrument pour garantir la reproduction symbolique et réelle du capital, ne fait plus partie du système doctrinaire prédominant en Bolivie et se voit aujourd’hui profondément interpellé.

L’arrivée de Morales et des mouvements sociaux au gouvernement a fait grandir l’auto-estime individuelle et collective de la majeure partie des boliviens (plus de 60% se considèrent comme indiens), ce qui fait qu’aujourd’hui, les insultes ou la violence physique utilisées depuis la conquête coloniale par les classes dominantes n’obtiennent plus les mêmes résultats que par le passé.

C’est en cela que les actions perpétrées par le paramilitarisme de l’Unión Juvenil Cruceñista (UJC) – organisation de jeunesse qui sert de couverture à des milices d’extrême-droite, ndt -, qui n’obéit qu’aux ordres du comité civique, de Branko Marinkovic (plus grand oligarque d’origine croate du département de Santa Cruz, ndt) et du gouverneur du département de Santa Cruz, Rubén Costas, sont plus un témoignage de faiblesse qu’une expression de force. Non pas qu’il faille sous-estimer les forces de la bourgeoisie bolivienne, dont le recours à la violence risque de s’aggraver au fur et à mesure qu’ils perdront du terrain politique, mais un processus d’expansion progressive des idées transformatrices semble être la tendance qui prime aujourd’hui dans la région orientale de Bolivie.

L’autre enseignement majeur à tirer de toutes les violences commises à Santa Cruz, qui, sans aucun doute, se poursuivront et s’étendront aux autres départements de la Media-Luna à mesure de l’avancée du processus de transformation, est que les pauvres, forts de leur double conscience (de classe et identitaire), ne craignent plus les multiples formes de violence que l’ultra-droite a pu employer contre eux ces derniers temps.

La marche du 29 août à Santa Cruz a constitué la preuve la plus éclatante qu’ils s’affranchissent de cette peur de l’oligarchie. Les adhérents de la Central Obrera Departamental (COD- Centrale Ouvrière Départementale, ndt) se sont rendus en cortège jusqu’à la principale place de la ville de Santa Cruz, afin de manifester leur soutien au référendum présidentiel, tout en sachant qu’ils y subiraient les agressions des miliciens de l’UJC.

Les bâtons, les brutalités et les injures chargées de haine et de racisme qui se sont violemment abattus sur les visages de femmes et d’hommes humbles, laissant même dans le coma un handicapé, n’ont pas fait plier la révolte populaire déterminée qui n’a fait que se renforcer dans cette région.

Si depuis deux ans et demi l’émergence d’un mouvement de lutte contre toutes les formes d’exclusion n’a fait que croître dans cette région orientale bolivienne considérée comme politiquement rétrograde, à partir des élections générales de 2005 et surtout depuis le scrutin relatif à l’Assemblée Constituante, la rébellion sociale est passée à un stade supérieur depuis mai et juin dernier, lorsque les oligarchies ont été confrontées à une forte résistance à leurs menées sécessionnistes dans de vastes zones rurales et jusque dans les propres villes des départements qu’ils contrôlent.

Ce niveau de riposte face au caractère illégal et illégitime des statuts d’autonomie, qui ont vu les taux d’abstention monter à près de 40% en signe de protestation, a constitué l’illustration la plus éloquente de la contestation sociale au cœur même des terres de la bourgeoisie agro-exportatrice et latifundiaire (par référence aux latifundia, grandes propriétés rurales, ndt).

Ainsi, un pourcentage élevé des habitants des quatre départements de la Media-Luna veut pouvoir s’exprimer de nouveau en votant. Mais avant qu’arrive le 7 décembre, les classes populaires des régions orientales auront à mener d’autres batailles d’autant plus décisives qu’elles détermineront l’issue du référendum constitutionnel et l’éventuel début d’une transition vers une Bolivie non capitaliste.

En définitif, entre août et décembre prochain, les batailles stratégiques entre l’alliance rebelle nationale-populaire-indigène et l’alliance impériale-coloniale-bourgeoise auront pour théâtres principaux les départements de la Media-Luna, Santa Cruz, Pando, Beni et Tarija.

http://www.la-epoca.com/modules.php?name=News&file=article&sid=132

 

traduction Pedro DA NOBREGA

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R
[G]Actus humanite.fr 11-09-2008[/G]<br /> [G][/G]<br /> [G][G]Bolivie. Evo Morales : "US go home !"[/G][/G]<br /> Le président Bolivien Evo Morales a demandé mercredi à l’ambassadeur des États-Unis, Philip Goldberg, de quitter le pays en l’accusant d’encourager des manifestations contre son gouvernement.<br /> "L’ambassadeur des États-Unis conspire contre la démocratie et veut l’éclatement de la Bolivie", a affirmé Morales dans un discours prononcé au palais présidentiel de La Paz.<br /> Le chef de l’Etat Bolivien a dit avoir demandé à son ministre des Affaires étrangères d’adresser à l’ambassade américaine une lettre intimant à Goldberg de "retourner d’urgence dans son pays".<br /> Le porte-parole du département d'État américain a rejeté les accusations boliviennes qualifiées d’"infondées" et a précisé que l’ambassade des États-Unis à La Paz n’avait reçu aucune notification de l’État Bolivien.<br /> Des protestataires ont pris d’assaut mardi des bâtiments publics dans l’est de la Bolivie pour réclamer l’attribution à leur région d’une part plus importante des revenus tirés des ressources énergétiques.<br /> Ils exigent également une plus grande autonomie de leur région et protestent contre la réforme constitutionnelle voulue par Morales, premier président indigène de l’histoire bolivienne.<br /> Mercredi, des manifestants ont endommagé un gazoduc dans le sud du pays, forçant la société nationale énergétique YPFB à le couper, ce qui a entraîné une baisse de 10% des exportations de gaz à destination du Brésil.
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